Selon les sources, au Burkina Faso indépendant, la première
exécution remonte aux années
1969. Il s’agit du garde
républicain Michel Yaméogo qui
avait assassiné son collègue
Emile Ilboudo le vendredi 28
juillet 1967 afin de s’emparer des
clefs pour voler de l’argent. C’est
ainsi qu’il fut condamné et
exécuté à Ouagadougou.
La seconde exécution a concerné
un groupe de coupeurs de tête
composé de Millogo Sogo Jean, El
Hadj Djane Batiékoro dit Béma et
Coulibaly Lotamou.
Condamnés le
12 septembre 1978, ils furent
exécutés le 15 Janvier 1979.
Notons que ces exécutions
étaient conformes aux lois de la
République, car la peine capitale
n’est pas abolie au Burkina Faso.
La première exécution
extrajudiciaire sera inaugurée
par Nézien Badembié, le n°2 du
CMRPN en décembre 1982 qui
reçut une raffale en pleine
poitrine. C’est le début de la
tradition des assassinats au
Burkina Faso. On tue désormais à
la moindre occasion, les
règlements de compte se font
par des armes. Les
révolutionnaires vont mieux
s’illustrer dans cette pratique.
Dès la prise du pouvoir le 04
Août 1983 qui avait fait cinq
morts par l’aile gauche, les ténors
de l’aile droite, à savoir le colonel
Yorian Gabriel Somé et le
commandant Fidèle Guébré sont
passés par les armes dans la
même semaine après qu’ils aient
été invités respectivement de
Ouahigouya et de Dédougou
pour une discussion entre
officiers.
Le 11 juin 1984 le colonel Didier
Kiendrébégo maire de
Ouagadougou et six de ses
camarades à savoir les
lieutenants Moumouni
Ouédraogo et Maurice
Ouédraogo, l’homme d’affaires
Adama Ouédraogo, l’ex-major de
gendarmerie Barnabé Kaboré, le
sergent du RCS Moussa Kaboré et
le pilote d’Air-Burkina, Issa
Anatole Tiendrébéogo, accusés
de complot ont été froidement
abattus sous un baobab et
enterrés à la hâte au cimetière de
Tanghin. Le 18 juillet de la même
année c’est le commandant
Amadou Sawadogo qui est tiré
comme un lapin vers 21heures
au niveau du barrage n°3 sur la
route de Ziniaré.
Le 15 Octobre 1987, la crise au
sein du CNR se solde par
l’assassinat de Thomas
Sankara et de ses douze apôtres
(Le professeur d’université Sibiri
Aain Zagré, le journaliste Paulin
Bamouni, les employés à la
présidence Fréderic Liemdé et
Bonaventure Compaoré, les
sergents chefs Emmanuel
Bationo et Amadé Sawadogo
Adjudant Christophe Saba,
Sergent-chef Emmanuel Bationo,
le caporal Yeyé, le soldat de 1ère
classe Noufou Sawadogo le
soldat de 1ère classe Der Somda,
le soldat de 1ère classe Wallilaye
Sawadogo) accusés de “
déviationnistes“ par les “
rectificateurs“.
La chasse aux sorciers qui s’en
suit emporte Seydou Bancé,
Sigué Vincent Askia, Michel
Koama, Elysée Sanogo et les
mutins de Koudougou dont
certains ont été grillés comme
des poulets. Ce sont entre autres
le Lieutenant Daniel Kéré, le
lieutenant Bertoa Ky, le lieutenant
Elysé Sanogo, le lieutenant Jonas
Pascal Sanou, tous tués et brulés
le 27 Octobre1987.Leur crime ?
Pour s’être s’opposés au coup
d’Etat de Blaise. Le plus célèbre
de ces mutins, Boukary Kaboré
dit le Lion a eu la vie sauve en se
refugiant au Ghana.
En 1988, le capitaine Guy Sayogo
et son épouse ont reçu une
grenade dans leur chambre au
camp Ouezzin Coulibaly à Bobo.
Très vite les coupables au
nombre de sept sont désignés et
expédiés au l’au-delà dans la nuit
du 31 décembre 1988.
Toujours en 1988, le
commerçant Seydou Bandé est
froidement abattu après avoir
creusé sa propre tombe. C’est le
comble du cynisme.
Au petit matin du 18 septembre
1989, c’était le tour des deux des
chefs historiques de la révolution
à savoir Boukary Jean-Baptiste
Lingani et Henri Zongo de quitter
ce monde pour raison de
complot. On les a fait
accompagner par Sabyamba
Koundaba et Anessé Gnégné
pour les mêmes raisons.
Blaise Compaoré est dorénavant
le seul rescapé des chefs
historiques de la révolution. La
révolution a mangé ses propre
fils, dira-t-on.
On s’attendait à un
apaisement, mais le régime
Compaoré n’avait pas encore fini
de balayer autour de lui. De
valeureux burkinabé de toutes
couches sociales vont subir le
coup de balai du régime
Compaoré. On peut citer des
journalistes comme Lamien
Watamou (19 juin 1999) des
professeurs d’université comme
Guillaume Sessouma (1990),
Oumarou Clément Ouédraogo
considéré comme le n°2 du Front
Populaire (9 décembre 1991),
des étudiants comme Boukary
Dabo (mai 1990) Michel Congo
(21 octobre 2001), des policiers
comme Madi Pascal Tapsoba, DG
de la police nationale (1994), des
paysans comme Douin Yedan (18
juillet 1993), Akou Agondwo, Adi
Bagniou,Kossi Gounabou,
Akandoba Kibora,Igoissan
Kibora, tous à Kaya (1995), des
élèves comme Blaise Sidiani,
Emile Zigani dans la cour de leur
école à Garango (9 mai 1995),
des chauffeurs comme David
Ouédraogo, chauffeur de
Français Compaoré (décembre
1997).
Le 13 décembre 1998, c’est le
coup de tonnerre, l’assassinat du
journaliste Norbert Zongo et de
ses trois compagnons Ernest
Zongo, Ablassé Nikiema et Blaise
Ilboudou. C’est l’indignation et la
révolte à travers le pays. Ces
révoltes ont secoué et fragilisé le
régime Compaoré.
Blaise
Compaoré fait semblant de
regretter les tueries, il demande
pardon au peuple et promet le
changement. Simple leurre. Les
tueries vont se poursuivre. Le
chat revenu de la Mecque ne peut
s’abstenir de dévorer les souris.
La liste se prolonge. On peut
retenir en août 200, la mort d’un
soldat du régime de sécurité
présidentielle Mahamadi
Ouédraogo et l’adjudant-chef de
gendarmerie Abdoulaye Demdé
en juin 2000, tous concernés par
l’affaire David Ouédraogo. Le 6
décembre 2000, c’est le petit
écolier Flavien Nebié qui tombait
sous les balles meurtrières. Nul
n’est épargné sous l’ancien
régime. Même les hommes
d’église comme le père Célestino
Di Giovambattist tombé suite à
des coups de hache le 13
octobre 2001.
Le 22 février 2011 la mort
suspecte de l’élève Justin Zongo
plonge à nouveau le pays dans
des troubles. Comme d’habitude,
le régime développe des
stratégies qui lui permettent de
juguler la crise et maintenir son
pouvoir entaché de sang de
nombreux innocents.
Les 30 et 31 octobre 2014, c’est
encore vingt quatre martyrs qui
ont sacrifié leur vie pour que les
Burkinabé se libèrent des griffes
du régime Compaoré. Jésus Christ
a perdu son sang sur la croix
pour sauver l’humanité. Nos
martyrs sont morts pour plus de
justice, plus de liberté, plus
d’équité au Burkina Faso. Cette
liste est loin d’être exhaustive.
Dans le célèbre ouvrage de
Ouattara Vincent,"L’ère
Compaoré, crimes politiques et
gestion du pouvoir", on
dénombre une centaine de
morts.
Blaise Compaoré croyait pouvoir
piétiner à jamais le peuple
burkinabé.
C’est un homme qui
n’aime pas les défaites, ni reculer.
En octobre 1987, il triomphe en
s’emparant du pouvoir. En 1991,
il triomphe contre les tenants de
la conférence souveraine. En
décembre 1991, seul en lice, il est
élu sans gloire, mais peu
importait pour lui. En 1998 après
la mort de Norbert Zongo, il
s’entête et garde son pouvoir. En
2011 après la mort de Justin
Zongo, il parvient à se maintenir
toujours grâce à ses manœuvres
politiques.
C’est cette erreur
mathématique qui a poussé
Blaise à croire qu’il est invincible,
qu’il pouvait encore une fois de
plus forcer le passage. Mais
comme on le dit, tous les jours
pour le dictateur, un jour pour le
peuple. Le peuple a enfin tranché.
Que nos morts reposent en paix
sous la terre libre et digne du
Burkina Faso.
Nous espérons que les états
généraux de la justice lui
donneront la force nécessaire
pour élucider tous ces crimes de
sang auxquels il faut ajouter les
crimes économiques.
Sources :
Ouattara Vincent, "L’ère
Compaoré, crimes politiques et
gestion du pouvoir", Klanba
Editions, Paris XIVème, 2006
L’Observateur Dimanche n°0029
du 07 au 13 juin 1996
Le Nouvel Ouragan n°227 du
vendredi 19 mars 1999.
L’Indépendant n°370, 10 octobre
2000
KIEBRE Mahamoudou,
Professeur certifié d’histoire
géographie
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